Répertoire dupatrimoineculturel du Québec

Peinture (Le Purgatoire)

Type :

Patrimoine mobilier (Oeuvre d'art / Ethno-historique)

Variante(s) du titre :

  • L'âme damnée
  • L'âme souffrante au milieu des flammes
  • Stimulus Poenitentium

Région administrative :

  • Montréal

Date :

  • après 1900 – avant 1925 (Production)
  • vers 1923 (Acquisition)
  • 2006 – 2007 (Restauration)

Thématique :

  • Patrimoine religieux (Mission)

Tradition religieuse :

  • Christianisme (Catholicisme (rite latin))

Classification :

  • Oeuvre d'art / Bien ethno-historique > Objets de communication > Beaux-arts > Peinture

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Images

Description

Cette huile sur toile a été peinte par un artiste non identifié, à partir d'une composition originale du frère Luc (Claude François, 1614-1685), peintre récollet qui séjourna en Nouvelle-France en 1670-1671. Émergeant d'entre les flammes qui l'entourent, un homme est représenté de la taille à la tête. Son buste nu est tourné de trois quarts vers la gauche. Tête penchée vers la droite, il a de longs cheveux bruns bouclés et montre un visage aux traits tendus dont les yeux se tournent vers nous. Son arcade sourcilière se crispe, sa bouche se contracte tandis que des larmes coulent sur ses joues. L'homme, dont des flammes lèchent l'avant-bras gauche, joint ses mains devant lui dans une attitude suppliante. Son poignet droit est prisonnier d'un bracelet de métal relié à une chaîne à gros maillons tendue depuis la partie supérieure gauche de la composition. Son biceps gauche est enchaîné de la même façon, la chaîne étant partiellement cachée, cette fois-ci, par un parchemin déroulé qui présente une inscription en langue algonquine.

Ce tableau a été restauré en 2006 par Anne Lapointe, grâce à une aide financière du Conseil du patrimoine religieux du Québec.

Numéro de l'objet :

  • Numéro d'accession : 2002.0274

Lieu de production :

  • Amérique du Nord > Canada > Québec

Dimensions :

  • Hauteur : 60,5 centimètre(s)
  • Largeur : 84,3 centimètre(s)

Médium :

  • Huile

Support :

  • Toile

Technique de fabrication :

  • Présumé : Peint

Représentation iconographique :

  • Chaîne
  • Le Purgatoire
  • Les fins dernières de l'Homme
  • Parchemin

Signature :

  • Non signé

Inscription :

en bas à droite de l'image: Wabamichin ej animissiyân ichkuteng ! / missake tiyan gaie kin ki/ pôn pimatissin, eka songa / nanckatchihitizossiwân nonguin megwatch pema / tissin wakit-akkanit [ Regarde-moi; vois comme je souffre dans le feu. Tu souffriras la même chose à ta mort si tu ne te convertis pas. Souffre pendant ta vie; courage pendant que tu es encore sur la terre.]

Sujet :

  • Allégorie
  • Figure
  • Religion

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Statuts

Statut Catégorie Autorité Date
Classement Partie d'un ensemble patrimonial Ministre de la Culture et des Communications 2021-08-19

Statuts antérieurs

  • Avis d'intention de classement, 2020-08-20
 
Inventorié --
 

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Informations historiques

La peinture du Purgatoire, produite pour la mission du Lac-des-Deux-Montagnes, s'inscrit directement dans l'iconographie associée au célèbre thème de la conversion par l'image si bien analysé par l'historien de l'art François-Marc Gagnon. De fait, dans l'objectif d'amener à la foi les Autochtones, considérés au tout début de la colonie française comme des âmes errantes et vagabondes, les missionnaires découvrent le pouvoir des images. Affranchie des barrières de la langue, l'image devient un instrument essentiel afin de capter l'attention des peuples autochtones, de toucher leur imagination, voire de leur montrer l'invisible. L'oeuvre se présente ainsi comme un moyen efficace de mettre les Autochtones en contact avec tout un univers de croyances.

Afin d'assurer le salut des peuples autochtones et pour leur apprendre à envisager l'au-delà avec Dieu, les missionnaires optent pour des thèmes eschatologiques montrant les fins dernières de l'Homme : la mort, le paradis, le purgatoire, l'enfer. Des sujets qui ont l'avantage de servir d'avertissement et de susciter la crainte, bref de favoriser la conversion. Attentif à la réalité de la Nouvelle-France - lui qui était venu dans la colonie en 1670-1671 -, le frère Luc produit dans les dernières années de sa vie une série de peintures des quatre fins de l'Homme. Gravées par Pierre Landry (vers 1630-1701), ces compositions connaîtront une large diffusion tant en Europe qu'en Amérique.

La série du frère Luc s'avère tout particulièrement adaptée à la sensibilité autochtone. De fait, les oeuvres correspondent en plusieurs points aux recommandations faites par le missionnaire jésuite Charles Garnier (1606-1649) au moment où il tente, vers 1645, d'obtenir de France des gravures et des peintures qui pourraient toucher les peuples qu'il veut convertir. Il faut, dit-il, que les oeuvres ne comptent pas trop de personnages, que ceux-ci ne portent pas de barbes (pour que l'Autochtone, doté d'une faible pilosité, puisse s'y identifier), que l'auréole des saints soit faite de rayons de lumière, qu'il n'y ait pas d'éléments superflus qui divertissent l'oeil, etc. Toutes ces particularités formelles, visant la simplicité et la lisibilité, se retrouvent justement dans les compositions du peintre récollet.

Conservé à Oka, ce tableau, peint à partir de l'image du purgatoire, témoigne bien de la popularité de la série du frère Luc dans les missions autochtones. Plus encore, avec sa représentation du feu et ses couleurs vives, la peinture devait toucher tout naturellement une crainte bien ancrée dans la réalité autochtone : celle de la torture. Le père jésuite Jacques Bigot (1651-1711), de Sillery, l'avait bien saisi. Vers 1683, il écrivait, tel que cité par François-Marc Gagnon :
« La peinture [des] feux de Lenfer, c'est Le feu où [...] leur ennemy les fait bruler, nous en avons icy qui se sont echapez de leurs mains, qui scavent la maniere cruelle dont Ils les tourmentent, et puis je leur ajoute que ces tourmens ne sont rien en comparaison de ceux de L'enfer. »

L'image choc, soit la superposition de la brûlure du feu ennemi à celle de l'enfer, rappelle comment les oeuvres étaient présentées et interprétées. C'est dans cette même logique que les missionnaires firent inscrire dans le tableau une petite sentence (phrase moralisatrice) en langue algonquine qui en explique la raison. Elle se traduit ainsi : « Regarde-moi; vois comme je souffre dans le feu. Tu souffriras la même chose à ta mort si tu ne te convertis pas. Souffre pendant ta vie; courage pendant que tu es encore sur la terre ». Le message de conversion est ainsi teinté de la menace de tourment éternel, répondant en somme à la logique mise en évidence par le père Paul Le Jeune (1591-1664) : « la crainte est l'avancouriere de la foy, dans ces esprits barbares » (Gagnon, 1975, p. 23).

Auteur : Pierre-Olivier Ouellet, 2014

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Références

Gestionnaires des données :

Univers culturel de Saint-Sulpice

Contributeur de données :

Univers culturel de Saint-Sulpice

Notices bibliographiques :

  • DESLANDRES, Dominique, John Alexander DICKINSON et Ollivier HUBERT. Les Sulpiciens de Montréal: une histoire de pouvoir et de discrétion, 1657-2007. Montréal, Fides, 2007. 670 p.
  • GAGNON, François-Marc. La conversion par l'image, un aspect de la mission jésuite auprès des Indiens du Canada au XVIIe siècle. Montréal, Bellarmin, 1975. 141 p.
  • GAGNON, François-Marc. « Le frère Luc ». CLOUTIER, Nicole et François-Marc GAGNON. Premiers peintres de la Nouvelle-France. Québec, Ministère des Affaires culturelles du Québec, 1976, p. 55-116.
  • LACROIX, Laurier. Les arts en Nouvelle-France. Collection Arts du Québec. Québec, Musée national des beaux-arts du Québec : Publications du Québec, 2012. 296 p.
  • MAURAULT, Olivier. Les trésors d'une église de campagne. Ottawa, Royal Society of Canada, 1947. 62 p.
  • MORISSET, Gérard. La Vie et l'oeuvre du frère Luc. Québec, Medium enr., 1944. 142 p.
  • PAGÈS, André de. Une église et son art sacré: L'Annonciation d'Oka. Oka, Société d'histoire d'Oka, 1995. 151 p.

Multimédias disponibles en ligne :

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