Biens mobiliers à caractère religieux (Sculpture antérieure à 1965)
Type :
Patrimoine mobilier
Thématique :
- Patrimoine religieux
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Patrimoine mobilier associé (139)
Inventaires associés (1)
Description
Le corpus constitue un cadre général de compréhension et de référence portant sur la sculpture religieuse, dite traditionnelle ou moderne, essentiellement exécutée en bois, puis dorée, peinte monochrome ou polychrome.
La sélection comprend plus spécifiquement les statues et reliefs conservés dans des lieux de culte, principalement classés, réalisés par une grande variété de sculpteurs allant des débuts de la colonie, soit vers 1700, jusqu'au Concile Vatican II, soit vers 1960. Loin d'être homogène, le corpus révèle une grande variété de procédés et de sujets, soit des œuvres isolées ou des ensembles statuaires, des sculptures figuratives sur certaines pièces de mobilier (tels que tombeaux et parements d'autel, chaires et bancs d'œuvre, buffets d'orgue, fonts baptismaux), des monuments et autres statues extérieures, associés à un lieu de culte, des calvaires de cimetière, quelques objets liturgiques et même une lampe du sanctuaire ainsi qu'une bannière de procession.
Les bois les plus utilisés, selon leur destination intérieure ou extérieure, sont des essences locales, des bois durs, comme le noyer noir ou le merisier, ou mous, comme le noyer cendré, le tilleul ou le pin blanc, ce dernier idéal pour l'extérieur. Vers 1850, l'atelier des Sœurs grises de Montréal met sur le marché une série de statues de la Vierge en carton pâte (ou en papier mâché), encollé puis modelé. À partir de 1880 environ, avec Louis Jobin et Olindo Gratton, les statues extérieures recevront souvent un recouvrement métallique, de plomb ou de cuivre, selon le procédé du repoussé-estampé qui consiste à frapper des feuilles de métal sur les formes d'un support en bois sculpté.
Les sujets, d'une grande diversité, sont étroitement liés aux dévotions populaires propres à chacune des époques. Certaines dévotions sont courantes tout au long de la période, la Sainte Famille, le Christ, dont l'omniprésent Christ en croix, ou la Vierge, sous différents vocables, saint Joseph, sainte Anne, les apôtres. Les thèmes sont également redevables aux dévotions particulières, comme les patrons de paroisse. Les sujets sont reliés aussi à leur lieu de destination : sur les façades des églises, une statue patronymique; dans la nef, des grands ensembles statuaires, au riche programme iconographique, ou les chemins de croix en relief; sur les chaires historiées, un Ange à la trompette à l'abat-voix et Moïse ou les évangélistes sur la cuve; enfin, sur les fonts baptismaux, le Baptême du Christ. À partir de 1850 environ, apparaissent aussi de nouvelles dévotions, souvent liées à des lieux de pèlerinage, tels le Sacré Coeur, l'Immaculée-Conception ou Notre-Dame-de-Lourdes, engendrant de nouvelles représentations.
En ce qui a trait spécifiquement à la sculpture figurative, la formation et le talent jouent un rôle déterminant dans le rendu des reliefs ou des rondes-bosses. Aussi, à l'intérieur de chacune des deux écoles de Québec et de Montréal, actives au XVIIIe siècle et dans la première moitié du XIXe, plusieurs catégories de sculpteurs livreront des ouvrages fort différents les uns des autres, engendrant des problèmes d'attribution, particulièrement pour le Régime français.
La sculpture religieuse du Québec, un art de commande, a laissé un impressionnant éventail d'œuvres répondant aux divers besoins d'une clientèle, parfois très exigeante. La transmission des traditions a pu se maintenir durant 300 ans grâce à un système d'apprentissage adapté aux conditions du milieu. Le corpus révèle des productions perméables à certains modèles européens ou américains, mais qui se révèlent originales dans l'interprétation, la facture et le style de chacune des œuvres. La production témoigne d'un mélange de traditions et d'innovations, d'éléments savants et de traits populaires, selon une évolution des influences étrangères et des changements de goût d'une société québécoise.
Statuts
Statut | Catégorie | Autorité | Date |
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Inventorié | -- | ||
Informations historiques
Essentiellement exécutée en bois, la sculpture religieuse ancienne, allant des origines jusque vers 1880, s'avère un art provincial ou colonial, répondant à des commandes, avec ses contraintes, ainsi qu'aux besoins, aux goûts et aux exigences particulières de la clientèle. La sculpture ancienne, basée sur un système d'apprentissage, évolue durant deux siècles sans réseau institutionnel.
En Nouvelle-France, la sculpture est la première forme d'art à se développer. Au XVIIe siècle, les demandes sont comblées, soit par des importations d'œuvres, soit par l'immigration de sculpteurs. Au XVIIIe siècle, les importations sont moins régulières, les sculpteurs européens établis dans la colonie, tel Jacques Leblond de Latour, étant capables de satisfaire les divers besoins et de former des sculpteurs locaux, comme Charles Vézina.
La famille Levasseur se distingue, à Québec, comme la plus illustre dynastie de sculpteurs locaux de la colonie. Parmi eux, Pierre-Noël Levasseur est le plus fameux statuaire canadien de son temps. À Montréal, Paul Jourdain dit Labrosse laisse des œuvres figuratives majeures.
Après la Conquête, peu de changements significatifs marquent la sculpture jusqu'à l'arrivée à Québec d'une nouvelle dynastie de sculpteurs, la famille Baillairgé. François Baillairgé devient à son tour le plus célèbre sculpteur canadien de son temps. Dans la région de Montréal, Philippe Liébert domine tous ses concurrents, dont François Guernon dit Belleville. Liébert influence la production de Louis Quévillon ainsi que ses nombreux apprentis dans la première moitié du XIXe siècle. Quévillon, avec des collaborateurs et disciples, tels René Saint-James dit Beauvais, Vincent Chartrand ou Urbain Brien dit Desrochers, monopolise le marché montréalais. Thomas Baillairgé, devenu architecte attitré du diocèse de Québec, va lui aussi former ou influencer toute une génération d'élèves et de disciples, dont André Paquet et François Fournier.
À partir des années 1850, la sculpture québécoise connaît une transformation rapide, au gré de la curiosité et de la sensibilité de la société victorienne ainsi que du triomphalisme de l'Église catholique. Des bouleversements majeurs sont liés aussi à l'immigration, à la spécialisation ainsi qu'à la percée d'un nouvel art, notamment en plâtre et en ciment. Les sculpteurs sur bois locaux font alors face à la concurrence des importations étrangères et des statuaires italiens. Avec l'avènement des styles éclectiques, dits historiques ou revivals, une véritable « statuomanie » s'empare des églises avec le déploiement de la ronde-bosse dans les décors intérieurs et la floraison de la statuaire d'extérieur. À partir de 1880 émerge une sculpture académique à l'européenne en bronze et en pierre.
Le statuaire montréalais Louis-Philippe Hébert entame sa carrière comme sculpteur sur bois en art religieux, avant de se tourner vers le monument commémoratif. Son disciple Olindo Gratton, poursuit dans la même veine, mais avec moins de succès. Du côté de Québec, Jean-Baptiste Côté est sans doute l'un des sculpteurs sur bois les plus originaux de son temps. Louis Jobin passe progressivement d'une production très diversifiée à une statuaire très spécialisée, soit les statues religieuses de grand format, généralement destinées à l'extérieur. À la même époque, l'École de sculpture de Saint-Romuald avec, entre autres, Lauréat Vallière, fait aussi sa marque et signe en quelque sorte la fin d'une sculpture dite traditionnelle. L'École de Saint-Jean-Port-Joli, représentée par Médard Bourgault, permet une renaissance des pratiques artisanales ancestrales.
À partir de 1920 jusque vers 1960, c'est une sculpture religieuse plus libre qui s'épanouit grâce au renouveau de l'art sacré ainsi qu'à un réseau institutionnel et commercial bien développé. Vers 1945 émerge une sculpture vraiment moderne ancrée dans les esthétiques contemporaines, avec Sylvia Daoust, Marius Plamondon, René Thibault ou Max Boucher.
Références
Notices bibliographiques :
- BÉLAND, Mario, dir. Restauration en sculpture ancienne. Québec, Musée du Québec / Centre de conservation du Québec, 1994. 150 p.
- BÉLAND, Mario. Louis Jobin, maître-sculpteur. Québec / Montréal, Musée du Québec / Fides, 1986. 199 p.
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- Commission des biens culturels du Québec. Les chemins de la mémoire. Monuments et sites historiques du Québec. Tome I. Québec, Les Publications du Québec, 1990. 540 p.
- Commission des biens culturels du Québec. Les chemins de la mémoire. Monuments et sites historiques du Québec. Tome II. Québec, Les Publications du Québec, 1991. 565 p.
- DÉSY, Léopold. Lauréat Vallière et l'école de sculpture de Saint-Romuald. Québec, Édition La Liberté, 1983. s.p.
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- LACROIX, Laurier. Les arts en Nouvelle-France. Collection Arts du Québec. Québec, Musée national des beaux-arts du Québec : Publications du Québec, 2012. 296 p.
- MULAIRE, Bernard. Olindo Gratton, 1855-1941 : religion et sculpture. Montréal, Fides, 1989. 191 p.
- SIMARD, Jean. Les arts sacrés au Québec. Boucherville, Éditions de Mortagne, 1989. 319 p.
- TRUDEL, Jean, dir. Le Grand héritage : L'Église catholique et les arts au Québec. Québec, Musée du Québec, 1984. 369 p.
- VILLENEUVE, René. Du baroque au néo-classicisme. La sculpture au Québec. Ottawa, Musée des beaux-arts du Canada, 1997. 220 p.