Répertoire dupatrimoineculturel du Québec

Pratique de la chanson traditionnelle dans le nord de Lanaudière

Type :

Patrimoine immatériel

Région administrative :

  • Lanaudière

Vitalité :

  • Vivant

Type d'élément :

  • Expression

Classification :

  • Pratiques expressives > Pratiques artistiques > Musique > Musique vocale

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Description

La chanson traditionnelle est une forme d'expression culturelle courante dans le nord de la région de Lanaudière. Elle se décline en chansons à répondre, à écouter (ballades, complaintes, etc.), à interpréter pour les enfants (berceuse, formulettes, etc.) ou entre enfants (comptines, rondes-chantées, etc.). Un grand nombre de Lanaudois s'adonne à la chanson traditionnelle dans la sphère privée, mais aussi lors de rassemblements communautaires ou publics. Leur répertoire de chansons traditionnelles se transmet de génération en génération depuis l'arrivée des premières familles sur le territoire vers le milieu du XVIIIe siècle.

Plusieurs chansons traditionnelles s'amorcent par des locutions telles que : « venez entendre le récit », « écoutez tous mes bons amis », « écoutez je vais vous chanter », etc. Elles se distinguent aussi par une phraséologie marquée d'un nom suivi ou précédé d'un adjectif (belle comme le jour, main blanche, cheval gris, claire fontaine, etc.). Ces chansons abordent des sujets comme les adieux du conscrit à sa maîtresse, le retour du soldat et la fille pressée de se marier; elles touchent souvent à des thèmes universels et intemporels tels que la guerre, le labeur et l'amour. Ces caractéristiques de la structure et du contenu, qui tirent leurs origines de la France médiévale, sont maintenues dans le répertoire du nord de Lanaudière.

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Historique

La colonisation du nord de Lanaudière se déroule principalement entre la deuxième moitié du XVIIIe siècle pour les paroisses du sud, et le milieu du XIXe siècle pour les paroisses du nord. Les premiers colons de cette vaste étendue colportent leur héritage culturel.

Dès les débuts de la colonie, la chanson traditionnelle accompagne les travaux quotidiens et donne la cadence à l'ouvrage. Les voyageurs se déplacent aussi au rythme des chansons à répondre. Plus tard, les chantiers forestiers de la région sont des lieux propices au partage du répertoire. Jusqu'au milieu du XXe siècle, les travailleurs forestiers proviennent de différentes localités et régions, ce qui favorise la dissémination de leurs chansons sur un plus vaste territoire.

Certaines chansons témoignent de l'exode des Canadiens-français vers la Nouvelle-Angleterre pour travailler dans des manufactures de coton au XIXe siècle. La deuxième moitié du XXe siècle marque l'avènement de l'accompagnement des chansons par divers instruments, dont la guitare. La fin de cette période transporte la chanson traditionnelle dans la sphère publique. Plusieurs groupes de chanson et de musique émanent de la région et font rayonner la culture traditionnelle québécoise.

Les années 2000 sont marquées par une contribution du milieu associatif et municipal à la reconnaissance, à la diffusion et à la transmission de la chanson traditionnelle. Le Centre régional d'animation du patrimoine oral (CRAPO) de Lanaudière présente, depuis 2004, plusieurs spectacles, émissions de radio et projets de documentation en chanson traditionnelle. L'organisme initie en 2009 la Grande fête du chant traditionnel de Lanaudière. Cet événement se poursuit jusqu'en 2016 grâce au Centre du patrimoine vivant de Lanaudière (CPVL). Depuis 2016, le CRAPO rassemble des chanteurs au sein de sa Chorale trad.

En 2008, l'organisme Mémoire et Racines attribue le titre de Capitale québécoise de la chanson traditionnelle à la communauté de Saint-Côme, située au nord-ouest de Lanaudière. À partir de cette même année, le CPVL contribue à la diffusion et la mise en valeur de la chanson traditionnelle de Lanaudière, notamment par la production de l'album « Saint-Côme peut vous en chanter » (2009) et de la série documentaire « Le chant du monde » (2014) réalisée par André Gladu et mettant à l'honneur des chanteurs de Saint-Côme. En 2014, la Municipalité de Saint-Côme confère à la pratique de la chanson traditionnelle de la localité un statut légal en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel du Québec.

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Contexte

La chanson traditionnelle dans le nord de Lanaudière se pratique dans la sphère privée et publique. Certains chantent exclusivement dans le milieu familial, d'autres cherchent à partager le chant en groupe élargi, d'autres encore se livrent à des performances sur scène. Dans tous les cas, le temps des Fêtes, surtout le jour de l'An, marque une période de pratique plus intense. Pour plusieurs, il s'agit d'un rituel annuel. Dans le contexte privé ou communautaire, les chanteurs et les répondeurs se placent en cercle et interprètent les mêmes chansons année après année. La fin des veillées est souvent réservée aux ballades et aux complaintes. Les chanteurs laissent alors place aux émotions plutôt qu'à la cadence effrénée des chansons à répondre.

La coutume veut que les chansons associées aux chanteurs – reconnues ainsi par le groupe – ne soient pas chantées par d'autres en leur présence, à moins qu'un porteur de tradition ou un parent ne l'autorise, ou qu'il demande à sa relève de chanter ces chansons « réservées ». La pratique de la chanson traditionnelle permet aux chanteurs nostalgiques de maintenir vivante la mémoire de leurs prédécesseurs, souvent un parent, grâce aux chansons transmises et aux souvenirs qu'elles évoquent.

Les veillées de chanson traditionnelle mensuelle du Centre régional d'animation du patrimoine oral de Lanaudière (CRAPO) constituent un point d'ancrage fort pour les amateurs de chanson traditionnelle. Ces veillées offrent un espace de pratique, de rencontre et de partage pour les chanteurs. Elles se font dans le même esprit que les veillées familiales, soit un échange en groupe restreint.

La pratique de la chanson traditionnelle participe au bien-être de ceux qui s'y adonnent au quotidien en ce sens qu'elle produit chez eux des effets biochimiques qui contribuent à apaiser leurs tensions. De plus, la pratique de la chanson traditionnelle constitue un facteur de cohésion sociale et procure un sentiment d'identité et de continuité pour les familles et les communautés qui l'exercent.

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Apprentissage et transmission

La chanson traditionnelle se transmet d'un individu à l'autre, de génération en génération, d'abord au sein de la famille. L'apprentissage du répertoire de chansons se fait principalement par imprégnation, en écoutant les membres de sa famille, des amis ou des chanteurs de sa communauté. La reproduction de cette forme d'expression peut inclure les mimiques, les gestes, les cris, le timbre de voix, les ornementations et autres techniques d'interprétation ainsi que des finales comme « Excusez-là! ».

La transmission se faisant principalement à l'oral, les chanteurs développent différentes techniques de mémorisation. Plusieurs s'aident par des images mentales en voyant dérouler un film dans leur tête. D'autres vont écrire les paroles, enregistrer et réécouter la chanson ou la répéter une quinzaine de fois avant de bien l'assimiler. La veillée de chanson, privée ou communautaire, constitue un lieu propice à la transmission de la pratique et du répertoire. Les archives sonores représentent également une source d'apprentissage.

Par ailleurs, la production d'albums, de spectacles et d'émissions de radio contribuent aussi à la transmission de la chanson traditionnelle. Dans le nord de Lanaudière, par exemple, la station de radio régionale CFNJ-FM rejoint un large public et contribue à la réappropriation du répertoire, en plus d'offrir des prestations en direct qui le met en valeur. Les auditeurs chantent en écoutant la radio et apprennent les chansons traditionnelles diffusées de façon récurrente.

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Références

Notices bibliographiques :

  • Enregistrement avec BOULANGER, Claude, Carmen DUPUIS, Yves MARION et Jean-Claude MARTIAL, réalisé par JETTÉ, Philippe, « Chansons et réflexions intimes, dans un salon ouvert! », s.l., s.d.
  • GLADU, André. « Le chant du monde ». Centre du patrimoine vivant de Lanaudière. Chaîne YouTube du CPVL [En ligne]. https://www.youtube.com/channel/UCEM0crBBxFcKag7dbEFH6qA
  • GUILCHER, Jean-Michel. La chanson folklorique de langue française, la notion et son histoire. Paris, Atelier de la danse populaire, 1985. 185 p.
  • HUBERT, Lisan et Danielle MARTINEAU. On a du plaisir nous autres. Joliette, Centre d'animation du patrimoine oral de Lanaudière, 2004. 198 p.
  • JETTÉ, Philippe. Série d'entrevues réalisées auprès de porteurs de tradition. Projet «La pratique de la chanson traditionnelles dans le nord de Lanaudière». Lanaudière, Centre régional d'animation du patrimoine oral (CRAPO), 2018. s.p.
  • JUTRAS, Monique. Chanson traditionnelle de Saint-Côme. Archives de folklore et d'ethnologie de l'Université Laval, fonds Monique Jutras, 1985. 50 p.
  • LAFORTE, Conrad. « La chanson de tradition orale, patrimoine poétique et musical ». Les cahiers de l'Association pour l'avancement de la recherche en musique au Québec. No 16 (s.d.), p. 53-64.
  • LAFORTE, Conrad. Survivances médiévales dans la chanson folklorique : poétique de la chanson en laisse. Ethnologie de l'Amérique française. Québec, Presses de l'Université Laval, 1981. 300 p.

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