Répertoire dupatrimoineculturel du Québec

Pointes folles

Type :

Patrimoine immatériel

Vitalité :

  • Vivant

Type d'élément :

  • Savoir-Faire

Classification :

  • Pratiques expressives > Activités artisanales > Artisanat et art populaire > Art textile

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Inventaires associés (1)

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Description

La fabrication de la courtepointe est un savoir-faire consistant à assembler des pièces de tissus généralement récupérées, cousues à la main ou à la machine en vue de produire une couverture. Cet art textile se décline en plusieurs variantes, dont la pointe folle, qui a comme particularité un assemblage aléatoire de pièces de couleurs, de tailles et de formes variées. Il s'agit d'un héritage culturel alliant l'artisanat d'origine française et britannique. La fabrication de courtepointe en pointes folles laisse libre cours à la créativité et se transmet le plus souvent entre femmes, au sein de la sphère familiale ou communautaire.

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Historique

La fabrication de la courtepointe naît de la possibilité de remplacer la fourrure sur le lit des colons de la Nouvelle-France. En effet, plus l'approvisionnement en textiles se démocratise, plus les témoignages démontrant l'existence de la courtepointe dans les foyers se multiplient. Elle constitue un objet de fierté pour les familles canadiennes-françaises issues de tous les milieux. Au Québec, la première mention écrite d'une courtepointe se trouve dans un acte notarié rédigé par Romain Becquet en 1679. Ces courtepointes étaient fabriquées selon le modèle européen des couvertures dites « indiennes » à l'aide d'un coton décoré de motifs à l'applique. À l'origine, ces objets étaient rares et coûteux, en raison du prix d'importation des matières premières.

C'est dans le dernier quart du XIXe siècle qu'apparaît la technique des pointes folles sur le territoire québécois. À l'origine, la « pointe folle » constitue une forme élémentaire et économique de récupération des retailles de tissus. Toutefois, dès la fin de l'époque victorienne, la fabrication des courtepointes n'est plus motivée par la nécessité domestique, mais plutôt par un désir de création. Cette période coïncide avec la multiplication de filatures de cotons québécoises, ayant eu pour effet de limiter les importations étrangères et de rendre le tissu plus accessible. L'ouverture de la première école d'enseignement ménager en 1882 permet également une diffusion des techniques artisanales dans les foyers.

À l'aube du XXe siècle, plus précisément entre 1880 et 1890, le « crazy quilt » ou « crazy work » est en essor chez les anglophones, pour la plupart descendants des Loyalistes venus s'installer au Québec à la fin du XVIIIe siècle. Ces carrés de pointes folles sont presque tous composés de matériaux nobles tels que la soie, le satin ou le velours, issus de retailles de vêtements et d'accessoires. Ces ouvrages ornementaux racontent l'histoire familiale de l'artisane et symbolisent la prospérité de la famille ainsi que l'importance de son statut social.

Au cours du XXe siècle, la tendance de récupération des tissus s'accroît et la courtepointe en pointe folle gagne en popularité. L'utilisation de la machine à coudre par une plus grande partie de la population facilite l'assemblage des tissus et la crise économique de 1930 ainsi que la Seconde Guerre mondiale font de la récupération une nécessité. Certaines pointes folles de facture canadienne-française réalisées à cette époque sont assemblées et doublées avec la fibre et même la ficelle des sacs de sucre, de farine et de céréales. À partir des années 1950, la plus large diffusion des patrons de couture et l'offre de couvertures manufacturées causent un déclin de la technique de pointes folles.

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Contexte

La réalisation des pointes folles est assez rapide et permet aux couturières et couturiers de recycler leurs retailles de tissus de forme irrégulière. Traditionnellement, les pointes folles servent à la création d'un couvre-lit, bien qu'aujourd'hui cette technique puisse être utilisée pour fabriquer des sous plats, sacs à main, coussins ou encore des poupées. Pour maîtriser la technique des pointes folles, il faut posséder une excellente dextérité et un bon sens esthétique afin d'agencer des couleurs.

De nos jours, les pointes folles sont assemblées à la machine à coudre. Il faut tout d'abord découper un carré dans un tissu pâle qui servira de fond à l'ouvrage. Les retailles de tissus sont ensuite cousues de manière concentrique, en commençant par le milieu. La couturière rajoute ainsi des retailles, jusqu'aux limites du carré. À chaque ajout, les pièces sont repassées. L'ensemble peut être orné de broderies décoratives, souvent réalisées avec des fils résiduels du tissage. Pour davantage de confort et de chaleur, les courtepointes sont parfois doublées d'une mousse ou d'un tissu sur l'endos. Enfin, la couturière pique son ouvrage, c'est-à-dire qu'elle fait passer une couture à travers toutes les épaisseurs de la courtepointe pour assurer une meilleure stabilité.

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Apprentissage et transmission

Jusqu'au milieu du XXe siècle, le piquage des courtepointes se faisait en groupe en janvier ou durant les corvées printanières ou en janvier . Le couvre-lit était étiré sur un cadre de bois et les artisanes se disposaient autour pour travailler. La technique de fabrication de courtepointe en pointes folles était alors transmise de mère en fille par observation et imitation. À partir de 1950, la diversité des produits manufacturés proposés chez les grands détaillants et l'entrée des femmes sur le marché du travail en milieu urbain déstabilisent la production de pointes folles au Québec.

Pour pallier ce bris des structures d'apprentissage traditionnelles, des groupes de transmission se sont rapidement développés. Toujours actifs aujourd'hui, les cercles de fermières participent à la diffusion de ce savoir-faire en proposant des cours, en organisant des conférences, des expositions, et des congrès en plus de publier la revue L«la bonne fermière ». Parmi les principaux milieux d'apprentissage des pointes folles, on retrouve également l'école des arts paysans fondée en 1929 par M. Oscar Bériau, la Coop des Arts domestiques du Québec et l'Association féminine d'éducation et d'action sociale. Il s'agit d'un savoir-faire alliant tradition et modernité puisqu'il répond aux défis contemporains de recyclage et de récupération tout en favorisant la pérennité d'un savoir-faire ancestral.

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Références

Notices bibliographiques :

  • Courtepointe Québec. Courtepointe Québec [En Ligne]. https://www.courtepointequebec.com/
  • DU BOIS, Francine. « Courtepointes anciennes au Musée McCord : se couvrir de mémoire ». Vie des arts. Vol. 32, no 129 (1987), p. 46-49.
  • DURAND, Marie. « La courtepointe québécoise : création ou emprunt ». Revue de la culture matérielle. Vol. 34, no 1 (1991), s.p.
  • Gallerie de l'UQAM. « Friendship Sampler Crazy Quilt : Modèle de broderies « amitié », courtepointe à pointes folles vers 1900 ». Gouvernement du Canada, ministère du Patrimoine canadien. Musée virtuel du Canada [En ligne]. https://150ans150oeuvres.uqam.ca/fr/oeuvre/1900-modele-de-broderies-amitie-courtepointe-a-pointes-folles/#description
  • LAMBERT, John. Travels through Lower Canada, and the United States of North America, in the Years 1806, 1807, and 1808. Vol. 1. Londres, Richard Philips, 1810. s.p.
  • Musée canadien de l'histoire. Pointe-folle [En Ligne]. https://www.museedelhistoire.ca/cmc/exhibitions/tresors/treasure/131fra.html
  • Musée virtuel du Canada. « Courtepointe dite en « pointe folle » ». Gouvernement du Canada, ministère du Patrimoine canadien. Musée virtuel du Canada [En ligne]. http://www.filsdeshistoires.ca/explorer-explore/courtepointe_dite_en_pointes_folles-crazy_quilt.html
  • Société d'histoire de Mascouche. Lorraine Rinfret et la courtepointe en pointes folles: Enquête du patrimoine vivant de Mascouche [En Ligne]. https://www.youtube.com/watch?v=fFJOgnF6P_k
    • La vidéo intitulée Pointes folles. Lorraine Rinfret et la courtepointe en pointes folles dans l'onglet Vidéos en fait partie.
  • STEWART STOTHERS, Marilyn. « Courtepointe ». Historica Canada. L'encyclopédie canadienne [En ligne]. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/courtepointe

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