Répertoire dupatrimoineculturel du Québec

Courses de canots sur la Lièvre

Type :

Patrimoine immatériel

Région administrative :

  • Laurentides

Thématique :

  • Patrimoine maritime et fluvial

Vitalité :

  • Vivant

Type d'élément :

  • Pratique

Classification :

  • Pratiques ludiques et sportives > Activité de compétition > Nautique/aérien > Pratique

Éléments associés

Inventaires associés (1)

Images

Description

Les courses de canots sur la rivière du Lièvre sont une activité sportive qui se pratique seul ou en équipe de deux, généralement à la fin de l'été ou au début de l'automne. Elles relèvent du domaine des pratiques sociales et événements festifs. La pratique actuelle s'inscrit principalement dans un contexte de compétition, lors de courses où les sportifs effectuent un parcours de longue distance entrecoupé de quelques portages. L'exercice demande un contrôle de l'embarcation, la connaissance des courants ainsi qu'une grande endurance physique.

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Statuts

Statut Catégorie Autorité Date
Inventorié --
 

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Historique

Avant son adaptation en compétition sportive, la navigation en canot sur les rivières des Hautes-Laurentides remplit une fonction utilitaire. C'est ce moyen de transport qui permet aux premiers défricheurs de coloniser toutes les parties du territoire dans le dernier quart du XIXe siècle, alors que ni routes ni chemin de fer n'existent encore dans le secteur. Jusqu'en 1895, le service postal qui dessert les colons échelonnés sur les rives de la Lièvre s'effectue en canot, de Kiamika jusqu'à Ferme-Neuve. Les curés et les missionnaires qui visitent la région voyagent également en canot, de même que les rares médecins et les marchands qui vont s'approvisionner à Labelle et dans les fermes forestières. Au début du XXe siècle, les quelques Autochtones anishinàbeg (algonquins) qui demeurent encore dans la région, notamment à L'Annonciation, fabriquent toujours des canots d'écorce. Les Canadiens-français s'inspirent de leurs méthodes de fabrication et transforment l'embarcation en un canot plus résistant, capable de transporter de lourdes charges.

Si des compétitions informelles entre canotiers ont probablement existé au fil de ces années, c'est en 1956 que la volonté d'organiser une course officielle prend véritablement forme. Au mois de novembre de cette année, un concours est lancé par un magasin d'articles de sport de Mont-Laurier : six équipes de canotiers effectuent une course de 18 milles sur la Lièvre, par un grand froid mêlé de bourrasques de neige. L'année suivante, le Syndicat d'initiative touristique de Mont-Laurier reprend l'idée et organise un événement sportif en bonne et due forme. Tenue au début octobre, la course comporte pour une première fois des participants d'autres régions, dont des canotiers expérimentés de la Mauricie, qui raflent tous les prix. Dès lors, cette compétition d'abord enregistrée sous le nom de « Championnat professionnel provincial de canot », est appelée à devenir l'événement sportif de l'année dans la région.

Au fil du temps, des bénévoles ainsi que divers organismes, comme des associations touristiques et des chambres de commerce, prennent en charge l'organisation de l'événement. L'Association des coureurs en canot de la Lièvre (ACCL), créée en 1978, remplit dès lors cette fonction. On en vient rapidement à organiser la course à la fin de l'été plutôt qu'à l'automne. Le parcours que doivent effectuer les canotiers sur la Lièvre change également à plusieurs reprises ; on y ajoute ou on y soustrait des étapes, allant même jusqu'à y combiner une épreuve de triathlon en 1998. Jusqu'en 1984, les coureurs en canots doivent être très vigilent afin d'éviter le bois de drave qui flotte sur la rivière. Dès les premières années, des équipes viennent des États-Unis et d'ailleurs au Canada. L'Américaine Elisabeth Schluter est la première femme à participer à la course, en 1977. L'événement attire chaque année des foules considérables pouvant comprendre jusqu'à 15 000 spectateurs. Des festivals et des événements culturels font aussi partie des festivités liées à la course, ce qui en fait un événement touristique régional d'envergure. En 2007, pour célébrer le cinquantenaire de la Classique internationale de canots de la Lièvre, une exposition rétrospective est organisée par la Société d'histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. Un parc municipal appelé « Parc des canotiers » est également créé à Mont-Laurier, sur le site déjà utilisé depuis de nombreuses années par l'Association des coureurs en canots de la Lièvre.

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Contexte

Les courses en canot sur la Lièvre sont une pratique principalement encadrée par l'Association des coureurs en canot de la Lièvre (ACCL), organisme créé en 1978 qui compte actuellement une trentaine de membres réguliers. L'association, qui a pour mission de regrouper les adeptes de canotage des Hautes-Laurentides, de promouvoir ce sport et d'assurer une relève, organise annuellement la Classique internationale de canots de la Lièvre. Cet événement renommé fait partie des grandes compétitions de canot long parcours qui ont lieu en Amérique du Nord. Il attire des participants du Québec, du Canada et des États-Unis, ainsi que plusieurs milliers de spectateurs. Des événements culturels et des festivals sont greffés à la compétition qui a lieu au mois d'août. L'Association des coureurs en canot de la Lièvre organise également des courses hebdomadaires durant l'été, des entraînements en groupe et diverses activités liées à la pratique de ce sport. Jusqu'en 1977, les équipes n'étaient composées que d'athlètes masculins; aujourd'hui, plusieurs femmes pratiquent ce sport.

En plus de nécessiter de nombreuses heures d'entraînement, ce sport de haut niveau repose aussi sur des connaissances, des savoir-faire et des techniques propres à cette pratique. Les canotiers doivent observer les courants, savoir passer sur les battures peu profondes, surfer sur les vagues, et parfois même naviguer sur des rapides. Lors d'une course, les canotiers doivent maintenir une bonne cadence et peuvent atteindre jusqu'à 80 coups d'aviron à la minute. Ils doivent manger et boire en avironnant d'une main, afin de préserver leur énergie et ne jamais perdre un coup d'aviron. Les compétitions comprennent des tours de bouée, effectués notamment pour changer de direction, ainsi que des portages afin de contourner des barrages ou des rapides.

Afin d'être en bonne forme physique et d'avoir l'endurance nécessaire, les sportifs s'entraînent dès la fonte des glaces sur la rivière. Gill Tinkler, célèbre champion de la région, creusait même un trou dans la glace durant l'hiver afin de débuter plus tôt l'entraînement; il pouvait ainsi avironner jusqu'à huit heures par jour. Les athlètes de la région des Hautes-Laurentides participent également à plusieurs courses qui se tiennent ailleurs au Québec et en Amérique du Nord, notamment la Classique internationale de canots sur la rivière Saint-Maurice, et le Au Sable River Canoe Marathon, à Grayling au Michigan.

L'équipement des canotiers a évolué au fil des années. Durant les années 1950, les canots étaient en cèdre recouvert de fibre de verre et mesuraient 16 pieds. Depuis 1976, ils sont fabriqués avec du kevlar, du graphite ou d'autres matériaux composites légers et mesurent 18 pieds. Les courses en canot sur la rivière du Lièvre génèrent un grand sentiment d'appartenance non seulement chez les sportifs, mais aussi chez les nombreux et fidèles spectateurs. La Classique internationale de canots de la Lièvre est considérée comme l'une des manifestations culturelles les plus importantes et les plus distinctives de la région.

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Apprentissage et transmission

La transmission de la pratique du canot marathon, ou course en canot, s'effectue généralement de maître à apprenti, par observation et imitation. L'enseignement est assuré par un membre de la famille ou un mentor. Plusieurs canotiers sont initiés très jeunes à ce sport alors qu'ils assistent aux entraînements et aux courses auxquels participe un parent. De plus, certains canotiers initient des amis, qui font parfois leurs débuts en remplaçant un membre de l'équipe absent lors d'une course. Des familles locales, comme les Tinkler, les Ménard et les Pagé pratiquent ce sport depuis trois générations, soit depuis les débuts de la Classique internationale de canots de la Lièvre. Durant certaines courses, on peut par exemple voir des équipes formées par un grand-père et son petit-fils.

Les canotiers regroupés au sein de l'Association des coureurs en canot de la Lièvre (ACCL) forment une sorte de confrérie ou de famille. Même si le sport s'exerce dans un contexte de compétition, une atmosphère de camaraderie règne au sein de l'organisme et lors de ses activités. Les entraînements et les ateliers tenus par l'association, de même que les événements festifs qui entourent la grande compétition annuelle permettent aux adeptes d'échanger entre eux, de partager des expériences et des techniques.

Même si les courses en canot sont une pratique sportive née au XXe siècle, elles tirent leur origine de la pratique séculaire du canotage sur les rivières du Québec, notamment celles des Hautes-Laurentides. Les canotiers initiés à cette pratique par filiation perpétuent ainsi une tradition ancienne qui remonte à l'établissement des premiers colons dans la région, voire au-delà. Les courses en canot sont familières aux résidents des municipalités établies aux bords de la Lièvre : même ceux qui ne pratiquent pas cette activité y sont généralement attachés et en retirent une grande fierté.

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Évaluation d'inventaire

  • Inventaire du patrimoine culturel de la MRC d'Antoine-Labelle (2016)
    MRC d'Antoine-Labelle


  • La valeur patrimoniale des courses en canot sur la Lièvre repose sur leur intérêt historique. Au Québec, la pratique du canot marathon, ou course en canot, est d'abord popularisée en Mauricie durant les années 1930. Des citoyens et associations de Mont-Laurier mettent ensuite sur pied des compétitions similaires à la fin des années 1950. Les origines du sport remontent toutefois à une époque beaucoup plus lointaine, celle où le principal moyen de transport pour se déplacer dans l'arrière-pays était le canot d'écorce. Le canotage est donc passé de pratique utilitaire à pratique sportive, ce qui témoigne de son adaptation dans le temps et à l'environnement. Par ailleurs, la pratique repose toujours sur des connaissances et savoir-faire hérités des ancêtres et des autochtones, comme la connaissance des courants et la maîtrise de l'embarcation en situation difficile.

    La valeur patrimoniale des courses en canot sur la Lièvre repose également sur leur intérêt identitaire. La Classique internationale de canots de la Lièvre et les festivités qui s'y greffent renforcent la cohésion du groupe et marquent un temps fort pour les canotiers, qui s'entraînent durant des mois pour s'y préparer. Puissant symbole identitaire, la pratique de la course en canot est une représentation distinctive de la culture des Hautes-Laurentides. Elle est source de grande fierté pour les canotiers, qui la reconnaissent comme un élément de leur patrimoine culturel. À Mont-Laurier, l'inauguration en 2006 du Parc des Canotiers, qui comprend sous un chapiteau permanent des panneaux d'interprétation historique sur cette pratique, témoigne de l'importance des courses en canot pour la population locale.

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    Références

    Notices bibliographiques :

    • BISSONNETTE, Diane. 50 ans de canot sur la rivière. Mont-Laurier, Association des coureurs en canot de la Lièvre, 2008. 56 p.
    • DESCHATELETS, Gilles. « Canots, chaloupes et barges ». La Laurentie, bulletin de la Société d'histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. No 10 (2011), p. 5.
    • GUÉNETTE, Suzanne. « Le Classique international de canots de la Lièvre ». La Laurentie, bulletin de la Société d'histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. No 9 (2010), p. 24.

    Multimédias disponibles en ligne :

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